- Les soupçons de corruption. Depuis le début, certains ont pointé du doigt les zones d’ombre d’un choix qui apparaissait comme l’expression du triomphe de l’argent et de la diplomatie du carnet de chèques.
- Le peu, voire l’absence de tradition footballistique au Qatar. Malgré les efforts consentis afin d’en faire une terre du ballon rond, force est de constater la maigre légitimité sportive d’un pays qui n’a jamais participé à une phase finale de coupe du monde.
- Les fortes chaleurs qui frappent le Qatar en été qui font que le thermomètre peut parfois afficher des températures de l’ordre de 45°C.
A ces critiques récurrentes, il faut ajouter que le Qatar fait l’objet depuis quelques mois d’une campagne de boycott provenant d’un certain nombre d’ONG telles que la Conférence syndicale internationale. Celles-ci souhaitent lever le voile sur la condition des ouvriers étrangers (notamment asiatiques) qui vivent dans des conditions déplorables. Ces travailleurs ne sont d’ailleurs pas les seuls à subir un droit du travail restrictif, car plusieurs joueurs et entraîneurs français restent abusivement bloqués dans l’émirat.
Cependant, c’est d’abord la question des conditions climatiques qui a poussé le président de la FIFA à faire cette déclaration, car depuis quelques mois l’éventualité d’un déplacement du tournoi en hiver suscite la controverse. Après avoir soufflé le chaud et le froid et changé d’avis à diverses reprises, celui qui est à la tête du football mondial depuis 1998 semble s’être définitivement rangé à cette option. Le problème est que cette décision fait grincer des dents certaines fédérations, notamment en Europe, qui ne sont pas du tout emballées par pareil chamboulement. Les responsables du football anglais ou allemand sont en effet en colère contre ce revirement qui risque de créer un « chaos » tant dans l’organisation des matchs que dans les droits télé ou les contrats des joueurs. Certaines critiques acerbes vont jusqu’à railler les ténors de la FIFA qui viennent de découvrir que la chaleur estivale est insupportable au Qatar.
Néanmoins, un retour sur l’histoire des Coupes du monde permet de s’apercevoir que cette question des températures a quelques antécédents. En Espagne en 1982, au Mexique en 1986 et même aux Etats-Unis en 1994, les cas de matchs joués sous de fortes chaleurs n’avaient rien d’une exception. Récemment, Michel Platini faisait remarquer qu’"aux Etats-Unis, la chaleur dans certaines villes comme Dallas était de 45 °C, et personne ne critiquait les Etats-Unis". Même son de cloche auprès de l’ancien international belge Marc Wilmots qui témoigne des mêmes conditions de jeu lorsque sa sélection avait joué à Orlando. Conscient de ces difficultés, les Qataris ont répondu en développant des systèmes de stades climatisés voire même de nuage artificiel suspendu au dessus du stade pour bloquer la chaleur du soleil. Malgré ces pistes, certains à la FIFA restent duratifs quant à la possibilité pour l’émirat de « climatiser tout un pays ». Sans compter le coût écologique de ces nouvelles installations même si l’émirat a promis de faire appel aux énergies renouvelables et de faire don de ces installations à certains pays africains afin d’y encourager la pratique du sport.
La véritable question derrière cette polémique est de savoir si oui ou non, il sera permis au Qatar d’organiser la compétition. Car si la décision de décaler le tournoi en hiver est approuvée par le Comité exécutif de la FIFA qui doit se tenir en octobre, cela pourrait ouvrir la voie à des contestations déposées par les candidats qui se sont inclinés face au Qatar lors du vote de Zurich de décembre 2010. La Corée du Sud, le Japon, les Etats-Unis et l’Australie pourraient donc se saisir de cette affaire et exiger un nouveau vote. Le Mondial 2022 vire donc au véritable casse-tête. Annuler son organisation au Qatar est inenvisageable car ce serait un véritable camouflet pour la FIFA qui ne s’en relèverait pas. D’autant qu’on imagine mal voir le Qatar stopper son plan d’investissement de 200 milliards de dollars destiné à mettre le pays en ordre de marche dans l’optique du tournoi.
De même, le retirer serait également tirer un trait sur l’une des idées sous-jacentes de cette Coupe du monde qui devait se présenter comme le Mondial du monde arabe. Ce sera en effet pour la première fois que le Moyen-Orient accueillera la compétition et la volonté pour la FIFA était aussi d’explorer de nouveaux territoires. Mais force est de constater qu’étant donné les contraintes financières et matérielles, seules les pays du Golfe peuvent, au sein du monde arabe, supporter le coût et l’organisation d’un tel évènement. Face à ce qui ressemble à une impasse, la FIFA ne semble donc avoir d’autre choix que de maintenir le Mondial au Qatar mais de le déplacer en hiver. Un choix qui déplaira à certains Européens mais qui réjouira d’autres. Depuis quelques temps, beaucoup, à l’instar de Michel Platini, plaident pour une réorganisation du calendrier footballistique européen afin d’étaler les championnats sur l’année civile et d’éviter ainsi que les matchs ne se disputent dans les moments les plus rigoureux de l’hiver.
Également publié sur le site : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/935522-mondial-2022-au-qatar-une-erreur-la-fifa-n-a-d-autre-choix-que-de-le-deplacer-en-hiver.html