Depuis une dizaine d’années, Doha a fait du football le principal outil d’expression de sa diplomatie sportive. La réception de grandes compétitions internationales, l’accent mis sur la formation (symbolisée par l’académie d’excellence Aspire), la mise en place d’un large réseau de diffusion télévisuelle avec Al Jazeera Sport et l’acquisition du PSG en sont les principaux facteurs.
Le PSG, une tête de gondole pour le Qatar
La mise à disposition d’une ligne budgétaire quasiment illimitée couronne une vision pensée dès la fin des années 1990. Elle se déploie aujourd’hui et place désormais le Qatar comme l’un des épicentres du sport mondial.
Le club parisien constitue la vitrine internationale de ce volontarisme politique.
A grand renfort de communication et de marketing, l’objectif est de hisser le PSG dans la cour des premières formations mondiales.
En recrutant Beckham à moindre frais, les dirigeants font d’une pierre trois coups.
1. Le joueur anglais, véritable marque à lui tout seul, permet de renforcer le prestige du club et consolide l’attractivité d’un championnat jugé, jusqu’à une période récente, peu compétitif sur la scène européenne.
2. Dans un même mouvement, il permet au Qatar de récolter les dividendes médiatiques d’un achat à forte rentabilité symbolique.
3. Enfin, c’est aussi une aubaine pour Bein sport et tous les produits dérivés du club de la capitale. La filiale française d’Al Jazeera Sport peut s’attendre à une augmentation de ses abonnés qui souhaiteront contempler sur ses écrans les matchs, entraînements et autres entretiens exclusifs de la star anglaise.
En définitive, c’est l’ensemble du dispositif pensé par QSI (Qatar Sports Investments) depuis deux ans qui va bénéficier des avantages collatéraux de ce nouvel épisode de la saga parisienne.
En plus des nombreux maillots qui vont s’arracher en France comme à l’étranger, ce sont aussi l’ensemble des stades français qui risquent d’afficher complet lors de la réception du PSG.
Communiquer pour savoir se faire oublier
Il est intéressant de noter que l’arrivée de Beckham tombe quasiment au même moment que la sortie du "Qatargate". Le faisceau de présomptions du dossier du magazine "France Football", s’il venait à être confirmé, est en effet accablant pour le Qatar.
Ce transfert permet de reprendre le dessus de l’agenda médiatique et de faire oublier une histoire qui a toutes les allures d’un scandale.
De même, QSI a pris soin de préciser que les émoluments du joueur seraient reversés à des associations œuvrant à la protection d’enfants.
Le contraire aurait été contre-productif. Une rémunération de l’ordre de 800.000 euros mensuels (comme évoqué l’an dernier lors de la première tentative d’achat de Beckham) aurait été jugée indécente par l’opinion.
Dans une France qui s’installe dans une crise économique durable et où les plans sociaux se multiplient, la petite touche caritative permet d’atténuer les critiques acerbes qui s’alarment des dérives du foot-business.
Cristiano Ronaldo, nouvelle star en devenir du PSG ?
Enfin, la durée du contrat est aussi un élément qui n’est pas le fruit du hasard. David Beckham jouera jusqu’à la fin de saison et on imagine mal qu’il poursuive, à 38 ans, sa carrière l’année prochaine.
A la fin de son contrat, les Qataris songeront à remplacer cette icône par une autre. Il n’est pas interdit de penser que dans les plans de Cheikh Tamim, véritable patron du PSG, le départ de Beckham en fin de saison sera compensé par la venue d’une autre recrue au potentiel de notoriété tout aussi puissant.
Le Portugais Cristiano Ronaldo, lui-même en difficulté avec son club et dont l’envie de départ n’est plus un secret, collerait donc parfaitement avec les desseins de QSI. L’histoire n’est pas finie.
Source : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/773538-beckham-au-psg-le-coup-de-genie-du-qatar-ou-l-art-de-s-imposer-par-le-soft-power.html