MONDIAL 2022. La FIFA blanchit le Qatar : pourquoi un tel manque de transparence ?

samedi, 15 novembre 2014 19:03

 

Slider Michael Garcia

C’est une information qui va momentanément soulager les autorités du Qatar. Après de longs mois de procédure et des semaines d’attente, la chambre de jugement de la FIFA a rendu public son avis sur le rapport de l'ex-procureur de New York, Michael J. Garcia. Ce dernier avait été mandaté par l'institution qui gère le football mondial pour faire la lumière sur les soupçons de corruption qui planent sur les Mondiaux 2018 et 2022.

Respectivement octroyées à la Russie et au Qatar, ces attributions ont été au centre d’allégations faisant état de "corruption". Particulièrement visé, le Qatar était dans l’œil du cyclone.

À l’appui de son enquête, le magazine "France Football" avait en janvier 2013 publié le dossier "Qatargate" dans lequel un mail interne du secrétaire général de la FIFA, Jérôme Valcke, mentionnait : "Ils ont acheté le Mondial 2022." 

Des conclusions sans appel

C’est pour démêler le vrai du faux que la FIFA avait décidé l’an dernier de charger Michael J. Garcia, spécialiste de la criminalité financière, de faire la lumière sur cette nébuleuse affaire.

Au terme d’une investigation de 18 mois qui l’a mené dans de nombreux pays où il a auditionné 75 témoins, celui qui occupe le poste de président de la chambre d’instruction de la commission d’éthique de la FIFA a rendu son rapport de 350 pages le 5 septembre dernier. C’est sur la base de ce rapport que Hans-Joachim Eckert, le patron de la chambre de jugement de la même commission, a rendu ses conclusions dans une note d’une quarantaine de pages publiée hier sur le site de la FIFA.

Ses conclusions sont sans appel ; les attributions des deux Coupes du monde n’ont pas à être remises en cause malgré des éléments douteux de "de portée très limitée". Mieux, il n'y a pas lieu "de se repencher sur le processus d'attribution" et "encore moins de le rouvrir". 

L'un des contentieux les plus lourds de l'histoire du foot

Suite à ces déclarations, on pourrait croire que pour la FIFA comme pour le Qatar, la lancinante polémique qui parasite depuis quatre ans le paysage footbalistique mondial touche à sa fin. On en est encore assez loin et même si les principaux concernés peuvent exprimer un premier "ouf" de soulagement, cela ne veut pas signifier que l’affaire est derrière eux.

Dès la publication de la note de M. Eckert, le procureur Garcia s’est fendu d’un communiqué où il prend le contrepied de son collègue jusqu’à évoquer des "présentations incomplètes et erronées". Décidé à aller plus loin, il a même exprimé son souhait de "faire appel de cette décision devant le Comité d'appel de la FIFA".

Le moins que l’on puisse dire est que le rapport Garcia fait donc l’objet d’une large différence de perception entre les différents acteurs chargés de trancher l’un des contentieux les plus lourds de l’histoire du football mondial.

Plusieurs personnalités plaident pour une publication du rapport

Cette sortie de M. Garcia est donc de nature à faire perdurer le feuilleton. De même, les conclusions de M. Eckert, même si elles sont positives pour la Russie et le Qatar, ne règlent pas tout le problème. L’une des interrogations qui restent en suspens est de savoir pourquoi la FIFA s’obstine à ne pas publier ce fameux rapport malgré les nombreux appels à aller dans ce sens. De Michel Platini à Franz Beckenbauer en passant par M. Garcia lui-même, plusieurs personnalités du football mondial expliquent que cette publication renforcerait la transparence dans un moment où l’institution en a grandement besoin. Mais, selon les juristes de la FIFA, c’est le code d’éthique qui assure "la confidentialité des témoins" qui empêche d’accéder à cette requête...

Éviter une crise sans précédent

Après ces nouvelles déclarations, la question reste entière de savoir si le Qatar maintiendra ou non "sa" Coupe du monde en 2022. Pour l’instant, les choses vont dans ce sens car le comité d’éthique de la FIFA ne peut que formuler des recommandations à l’adresse du comité d’exécutif qui lui, est souverain et détient la parole finale.

Or, ce dernier ne semble pas empressé de revenir sur le vote attribué car on imagine le cataclysme que cela induirait. D’abord, parce que selon de nombreux observateurs, remettre en cause l’attribution du Mondial 2022 impliquerait de revenir automatiquement sur celle de 2018 ce qui créerait une crise sans précédent. De même, les enjeux financiers sont colossaux car ce sont des dizaines de milliards de dollars qui sont aujourd’hui en jeu.

Enfin, davantage que la Russie et le Qatar, c’est la FIFA qui risque de ne pas se relever d’un tel scénario car sa crédibilité serait réduite à néant. Le dossier est donc loin d’être clos.

 

Tribune également publiée sur le site Le Plus-Nouvel observateur :http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1278431-mondial-2022-la-fifa-blanchit-le-qatar-pourquoi-un-tel-manque-de-transparence.html

 

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