Nabil Ennasri
Turquie/Qatar/Iran/Hamas contre Arabie/Emirats/Egypte/Israel : vers une nouvelle équation stratégique au Moyen-Orient
Cela fait désormais plus d’une semaine que la crise du Golfe a débuté et que le Qatar est soumis à un sévère blocus. Au delà de l’actualité immédiate, ce conflit entre monarchies pétrolières doit nous amener à comprendre que le Moyen-Orient est entré dans un nouveau cycle d’alliances qui va durablement recomposer l’équation stratégique régionale.
Disons-le sans ambages : la crise qui traverse la région du Golfe n’est pas passagère. Mûrie depuis longtemps, l’offensive saoudo-émirienne a de grandes chances de monter encore en puissance étant donné la détermination des élites dirigeantes à Riyad et Abou Dhabi de faire plier Doha.
Le Maroc propose sa médiation dans la crise du Golfe
Silencieux depuis le début de la crise, le Maroc a exprimé dimanche 11 juin une position officielle allant dans le sens d'un dénouement de la crise par le biais de l'échange et du dialogue.
La position de la monarchie chérifienne était attendue étant donné les relations étroites qu'elle a pu nouer ces dernières années entre les différents protagonistes. Sans s'aligner sur l'une des parties, Rabat a joué la carte de l'apaisement en exhortant les "pays frères du Golfe" à renouer les liens pour éviter de prolonger une crise qui serait préjudiciable à la nation arabe. C'est par un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la coopération internationale que le royaume s'est exprimé.
59 personnalités dont le cheikh al-Qaradawi et 12 entités dont Qatar Charity accusées de terrorisme par l’Arabie saoudite, les Emirats, Bahreïn et l’Egypte
C’est une nouvelle escalade dans la crise que le Golfe connaît depuis lundi 5 juin. Alors que de récents signaux laissaient entrevoir un début d’amélioration, la décision de mettre sur une liste noire de soutien au terrorisme des institutions qataries ou des personnalités de l’émirat est de nature à envenimer la situation.
Le communiqué signé par les quatre Etats ne laisse aucun doute sur la détermination de Riyad, Abou Dhabi, Manama et Le Caire de poursuivre la politique d’endiguement du Qatar. Dans un moment géopolitique où la lutte contre le terrorisme domine l’agenda de toutes les diplomaties, la volonté de mettre au ban le Qatar se trouve renforcé par cette nouvelle accusation. Sur les 59 personnalités visées, plus d’une vingtaine sont soit de nationalité qatarie soit résident dans l’émirat. Pour ce qui est des institutions, sur la douzaine ciblée, cinq d’entre elles correspondent aux plus grandes ONG du Qatar telles que Qatar Charity ou Sheikh Eid al-Thani Charity Foundation. Ces organisations ont la particularité d'être actives dans les territoires frappés par la famine ou la guerre comme les camps de réfugiés Royingas au Bangladesh, la Somalie, la bande de Gaza ou les zones paupérisées d'Afrique sub-saharienne. Ces dernières années, elles se sont aussi particulièrement illustrées dans l'aide aux réfugiés syriens en Turquie, Jordanie et Liban.
La Turquie décide d’envoyer des troupes au Qatar
Alors que le président turc s’est exprimé sur la crise pour la première fois en prenant position pour le Qatar, le parlement d’Ankara a voté un projet de loi autorisant l’envoie de militaires dans l’émirat.
Cette décision traduit une volonté de la Turquie de choyer l’un de ses alliés les plus importants au Moyen-Orient. En effet, ces dernières années, le partenariat bilatéral s’est considérablement renforcé tant au niveau de la coopération industrielle, énergétique, militaire que politique. Le volume des échanges commerciaux a décuplé en quelques années et signe de la bonne santé de cette relation, les deux chefs d’Etat se rendent visite plusieurs fois par an.
C’est donc presque naturellement que le président turc a exprimé une position allant dans le sens du Qatar dans la crise qui secoue la région du Golfe. Qualifiant les sanctions prises à l’encontre de Doha de « pas bonnes », Recep Tayeb Erdogan a ajouté : « en tant que Turquie, nous allons poursuivre et développer nos relations avec le Qatar, comme avec tous nos amis qui nous ont soutenus dans les moments les plus difficiles, notamment le putsch du 15 juillet ».
Ces militaires stationneront dans la base permanente turque que l’armée d’Ankara dispose sur le sol de l’émirat. La présence de cette base avait été actée lors de l’accord stratégique de défense signé entre l’émir Tamim ben Hamad al-Thani et Recep Tayeb Erdogan en décembre 2014. 150 soldats turcs y sont déjà stationnés.
Pourquoi le Hamas, les Frères musulmans et l'Iran sont au cœur des enjeux de l'actuelle crise dans le Golfe ?
La crise entre le Qatar et plusieurs pays arabes qui a débuté lundi 5 juin 2017 n’est pas prête de s’éteindre. Etant donné la complexité de la situation, L’observatoire du Qatar vous propose cet article qui permet, en répondant à cinq questions, de comprendre les véritables tenants et aboutissants d’une affaire qui va durablement recomposer l’équation stratégique de la région.
Où en est-on aujourd’hui dans la crise entre le Qatar et ses voisins ?
La situation est très volatile et elle évolue de jour en jour et même d’heure en heure. Mais aujourd’hui, mercredi 7 juin 2017 à midi, voilà ce que l’on peut dire.
Reprise de la guerre froide du Golfe ?
Le Qatar a annoncé mardi dans la nuit que son agence de presse QNA a été piratée par une entité inconnue et qu’un faux communiqué attribué à l’émir avait été diffusé. Ce dernier affirmait que Tamim ben Hamad al-Thani s'était prononcé sur divers sujets sensibles mettant en cause ses voisins du Golfe. Ces fausses déclarations, immédiatement relayées par des médias saoudiens et émiratis, ont provoqué un tollé dans la région où une guerre médiatique bat son plein.
Déjà fragiles, les relations entre le Qatar et certains de ses voisins ne sont pas prêtes de s’améliorer. La cause ? Un obscur épisode de piratage de l’agence de presse officielle du Qatar (Qatar News Agency, QNA) au cours duquel certains acteurs foncièrement opposés à la ligne politique de l’émirat gazier se sont engouffrés. Loin d’être anodine, cette affaire démontre combien les relations à l’intérieur du Conseil de coopération du Golfe (CCG) demeurent, malgré les formules de fraternité d’usage, fortement clivées.
Le premier stade de la Coupe du monde 2022 est prêt
Le Qatar a inauguré il y a quelques jours son premier stade en vue du Mondial 2022. Prêt près de six ans avant la compétition, il a bénéficié d’une large rénovation qui en fait l’une des enceintes les plus modernes de la région.
Alors que le tournoi phare du football mondial ne se déroulera que du 21 novembre au 18 décembre 2022, le Khalifa International Stadium est déjà opérationnel. Cet édifice est un monument symbolique au Qatar puisqu’il s’agit du premier stade digne de son nom construit dans le pays en 1976. En 2005, il a subi une première rénovation dans l’optique de l’accueil des XVe Jeux asiatiques qui se sont tenus à Doha en décembre 2006. Ces dernières années, il a bénéficié d’une deuxième réhabilitation dont le coût s’est élevé à près de 100 millions d’euros.
QNA, l’agence de presse officielle victime d’un piratage informatique
Le gouvernement du Qatar a vigoureusement dénoncé le piratage dont son agence de presse officielle, Qatar News Agency (QNA) a été victime dans la nuit de mardi à mercredi. Pour le moment, les autorités affirment ne pas avoir connaissance de « l’entité » responsable du forfait.
L’attaque informatique a eu pour incidence la diffusion d’un faux communiqué attribué à l’émir Tamim ben Hamad al-Thani. Celui-ci aurait tenu des propos suspicieux voire négatifs sur l’état des relations entre son pays et ses voisins ainsi qu’avec l’administration américaine. Après avoir informé que « l’agence de presse du Qatar a été piratée par une entité inconnue », le service de presse gouvernemental a ajouté qu’« un faux communiqué attribué à Son Altesse a été publié ».
L'Algérie, le Maroc, la Turquie, le Qatar et 18 autres pays adoptent une résolution à l’UNESCO condamnant l’occupation israélienne de Jérusalem
Pour la troisième fois en un an, l’agence onusienne publie un document officiel où elle condamne les agissements de l’Etat hébreu dans la ville sainte. Cette décision a suscité le courroux du gouvernement israélien qui a promis de réduire son financement à l’ONU.
L’Unesco a adopté mardi 3 mai une résolution rejetant la souveraineté israélienne sur une partie de la ville de Jérusalem. C’est la troisième fois en l’espace d’une année que l’agence des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture se prononce en ce sens et réaffirme une disposition du droit international qui ne reconnaît pas l’occupation par Israël des territoires conquis par la force lors de la guerre de 1967. Le texte rappelle notamment « que toutes les mesures (...) prises par Israël, une puissance occupante, qui ont altéré ou visent à altérer le statut de la Ville sainte de Jérusalem sont nulles et non advenues et doivent être annulées. »
Des ONG arabes et turques lèvent près de 300 millions de dollars pour la Syrie lors d'une réunion à Doha
Rassemblés dimanche 30 avril dans la capitale qatarie en présence des responsables de l'ONU, ces acteurs humanitaires ont promis 262 millions de dollars en aide humanitaire au peuple syrien d'après une dépêche de l'agence officielle QNA.
Ce rendez-vous s'est tenu en guise de préambule d'une conférence internationale prévue quelques jours plus tard en Belgique destinée à faire le point sur l'urgence humanitaire en Syrie. Ravagé par la guerre, le pays fait face à une situation dramatique qui, d'après l'ONU, est constitutive de la "pire crise humanitaire que le monde a connu depuis le génocide du Rwanda en 1994".