Le plus grand centre islamique d’Europe
Les détails de ce projet ont été fournis, mercredi 15 juin, par les représentants de Qatar Charity ainsi que par la délégation française associée au projet lors d’une conférence de presse organisée au siège de l’ONG à Doha. La délégation française était composée de trois femmes faisant partie de l’Association des musulmans d’Alsace. Il s’agit de Khadija Halfia, Beyout Ogheili et Hind Al Mohafid.
Jusqu’à présent, plus de 55% des travaux de construction ont été achevés. Au point mort pendant de nombreuses années, le projet bénéficie ces derniers temps d’une accélération de sa concrétisation du fait du dynamisme de la nouvelle équipe dirigeante. L’association porteuse du projet a profité du Ramadan pour organiser des visites à destination des fidèles. Une vidéo et des photos postées sur le compte Facebook de l’association montre la rapide avancée des travaux. Cependant, le coût considérable de l’édifice (qui comprend, outre une vaste salle de prière, de nombreux bureaux et salles de cours, un amphithéâtre, une bibliothèque et même une piscine olympique) a obligé les responsables à faire appel à des donateurs étrangers. C’est dans cet objectif que Qatar Charity, l’une des plus importantes ONG de l’émirat, a lancé une campagne pour lever des fonds afin de couvrir le montant restant.
Un centre éducatif au service de tous
"Le centre est un projet de rêve pour la communauté musulmane de la ville de Mulhouse. Peu à peu, il devient une réalité grâce aux donateurs et en particulier à la population qatarie et à Qatar Charity", a ainsi déclaré Khadija Halfia. Pour démontrer le sérieux du dossier et rassurer sur la manière dont le centre parviendra, à terme, à une autonomie financière, Beyout Ogheili a précisé que "le centre aura des installations commerciales qui généreront suffisamment de revenus pour couvrir les coûts d'exploitation". Preuve de son installation comme un monument qui s’insère dans le tissu urbain de la cité, les responsables ont tenu à préciser que les autorités n’avaient exprimé aucun avis défavorable et que l’ensemble du projet est géré de façon responsable et transparente. Il est d’ailleurs à noter que l’initiative du centre Annour a été validée par les autorités locales, notamment le conseil municipal de la ville de Mulhouse ainsi que par la région. Et que, hormis le Front national local, peu d’acteurs ont exprimé leur rejet ou réticence.
Avec une architecture souhaitant conjuguer tradition et modernité, le centre Annour a cœur de vouloir servir le message de l’islam dans sa version authentique du juste milieu. Ainsi, une part importante de son activité sera concentrée vers l’éducation et la transmission du savoir. Plus de 1100 étudiants y recevront une éducation religieuse et l’espace enseignement abritera onze salles de cours, une ludothèque, une salle informatique, des cours pour enfants ainsi qu’un institut d’apprentissage du Coran, de la langue arabe et des sciences islamiques. L’ouverture d’un établissement d’enseignement privé musulman est également prévue et la salle de prière pourra accueillir près de 2 500 fidèles. Illustration des projets novateurs qui germent au sein des communautés musulmanes de France et d’Europe, le projet sera aussi composé d’un espace santé et bien-être comprenant une piscine, une salle de sport et tout un ensemble de remise en forme (sauna, hammam et spa).
La participation financière du Qatar en question
Même si le projet, du fait de son envergure, ne peut que réjouir la communauté musulmane locale, il n’est pas interdit d’interroger la pertinence du choix du Qatar comme puissance étrangère invitée à participer à son financement. Cette interrogation ne cible pas spécifiquement l’émirat mais pose en creux la question de la place des apports étrangers dans l’établissement des lieux de culte français. L’idée ici n’est pas de relayer les fantasmes (pour ne pas dire délires) de certains médias et politiques (notamment populistes et d’extrême droite) qui hurlent dès lors que le Qatar s’engage dans le terrain français d’autant que les fonds de Qatar Charity transitent par des circuits officiels complètement transparents et contrôlés. Non, il s’agit surtout de mettre en évidence le souhait de la grande majorité des Français de confession musulmane qui veulent l’émergence d’un islam de France totalement indépendant sur le plan financier, politique et intellectuel. Certes, la porte ne doit pas être fermée pour des dons privés venant de personnes bien intentionnées (dons qui doivent donc se faire sans contrepartie), mais il serait plus judicieux à l’avenir de miser uniquement sur les communautés locales pour construire des lieux de culte avec un personnel religieux né, scolarisé et formé en France.