Après l'édition en Russie, le Qatar s'apprête à recevoir "le Mondial de tous les Arabes" en 2022

lundi, 23 juillet 2018 18:07

imageLe Mondial en Russie vient de se terminer et place désormais à celui du Qatar. Organisé dans quatre ans et présenté par l’émir Tamim comme celui de « tous les Arabes », cette édition aura à relever de lourds défis.

À l’occasion d’une cérémonie organisée dimanche 15 juillet au Kremlin, le chef d’Etat russe Vladimir Poutine a remis un ballon officiel de la Coupe du monde à l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad al-Thani.

En présence du président de la FIFA, cet événement a symboliquement et définitivement propulsé le petit émirat au centre de l’attention mondiale. Désormais, l’ensemble de la planète football n’aura d’yeux que pour l’émirat gazier et, eu égard au succès planétaire du Mondial russe, nul doute que les attentes seront énormes afin de revivre un mois de compétition aussi intense que celui qui vient de s’achever.

Le Qatar dans l’œil du cyclone

La pression est donc dorénavant sur les épaules du Qatar qui se prépare depuis huit ans déjà à recevoir avec les honneurs le plus grand rendez-vous du sport au monde (avec les Jeux olympiques). Première de l’histoire pour le Moyen-Orient et le monde arabe, l’édition qatarienne a déjà fait couler beaucoup d’encre. Outre la question des suspicions de corruption autour de son attribution (accusations également formulées contre la Russie pour 2018 et, avant elle, à d’autres pays organisateurs comme l’Allemagne en 2006), le Mondial 2022 sera aussi le premier organisé en hiver.

Programmé du 21 novembre au 18 décembre 2022 (la finale aura lieu le jour de la fête nationale qatarienne) dans le but d’éviter les températures infernales de l’été, ce changement de date n’a pas été accueilli avec satisfaction par bon nombre de fédérations européennes qui vont voir leur calendrier de championnat chambouler pendant au moins deux saisons.

Outre ces critiques récurrentes, d’autres charges risquent de s’accentuer à mesure que la date fatidique du coup d’envoi du match inaugural approchera. Même si la question de la consommation de l’alcool a été soldée par le Comité de préparation qatarien promettant des fans-zones avec possibilité de se procurer de la bière, la question des capacités hôtelières d’un pays à peine plus grand que l’île de France est posée. Si près d’un million de visiteurs étrangers ont déferlé en Russie le mois dernier, on en attend environ un million et demi pour 2022, les supporters venant d’Asie devant constituer l’essentiel du surplus.

Enfin, dans une région hautement volatile en proie à des accents de violence récurrents, l’enjeu de la sécurité est dans tous les esprits à l’heure où les mouvements terroristes – malgré leur agonie - semblent jeter leur dévolu sur ces grands rassemblements afin de maximiser l’effet de sidération auprès des opinions.

Un émirat sur les starting blocks

Mais pour convaincre le grand public du bon choix d’avoir opté pour Doha, les autorités comptent sur le sérieux de leur dossier qui, il y a huit ans, avait déjà conquis les membres du Comité exécutif de la FIFA. Il y a d’abord la solidité des infrastructures modernes construites pour l’occasion, comme par exemple le nouveau métro de Doha dont les premières lignes seront livrées dans quelques mois et qui a coûté la bagatelle de 36 milliards de dollars.

S’agissant des équipements sportifs, sept stades flambant neufs doivent encore sortir de terre dont deux seront inaugurés l’an prochain. L’émirat met aussi en avant sa solide expérience dans la bonne gestion des grands rendez-vous sportifs. Le palmarès en la matière commence à être fourni puisque le Qatar a accueilli au pied levé en 1995 la Coupe du monde de football des moins de 20 ans, les 15e Jeux asiatiques en 2006 (compétition d’ampleur puisqu’elle est considérée comme le troisième évènement sportif au monde après les JO et le Mondial), les 12e Jeux panarabes en 2011 ou le Mondial de Handball en 2015. En 2019, il sera l’hôte du Mondial d’athlétisme sans compter les dizaines d’autres tournois ou compétitions d’ampleur continentale ou régionale (comme la Coupe du Golfe de football) qu’il compte à son actif.

Bref, pour les autorités, les peurs sur les capacités du pays à absorber un tel afflux en l’espace de quelques semaines sont à écarter. Surtout qu’il reste encore quatre ans pour parachever tous les projets et que l’émirat, fort d’un fonds souverain doté de plus de 300 milliards de dollars, dispose des moyens de ses ambitions.

L’une des dernières équations à résoudre pour ce Mondial reste le nombre d’équipes participantes. Si jusque là, trente-deux équipes s’affrontaient pour la phase finale, ce chiffre sera porté à quarante-huit sélections en 2026. Mais suite à une requête des fédérations d’Amérique du Sud, la perspective d’un passage à quarante-huit pourra se faire dès 2022. Le Qatar et la FIFA sont en négociation sur cette proposition qui sera définitivement actée dans quelques mois. Mais si elle venait à être acceptée, l’idée que d’autres pays de la région accueillent des matchs se fera de plus en plus insistante, ce qui, en l’état actuel de la géopolitique du Golfe, relève du voeu pieux pour certains d’entre eux.

Soumis à un blocus sévère de trois de ses voisins, Doha fait en effet face à un embargo dont rien n’indique qu’il est en passe d’être desserré comme l’a récemment démontré le piratage de la chaîne BeIN Sports par des hackers saoudiens. A moins que, pour soulager la pression et sortir par le haut de la crise, Doha décide « d’offrir » certains matchs à certains de ses voisins avec qui elle a noué des relations fortes comme le Koweït, Oman voire l’Iran. Ce serait alors un habile pied de nez aux pays du Quartet. 

Une version de cet article a été publié sur le site de Middle East Eye. 

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