Nabil Ennasri

Nabil Ennasri

mardi, 07 mai 2013 02:00

Entretien avec Pascal Boniface

1852382 6 cf09 vue-aerienne-de-doha-la-capitale-qatarie-le 532b440438df1f7c6c0ec88f13f21cc4Nabil Ennasri, auteur de « L’énigme du Qatar » (IRIS Editions), répond aux questions de Pascal Boniface, directeur de l’IRIS.

Vous venez de publier L'énigme du Qatar, comment expliquez-vous cette floraison de livres sur le Qatar ?

C'est d'abord le reflet d'une volonté de répondre aux grandes interrogations que suscite le sujet "Qatar" auprès de l'opinion. Depuis deux ans, l'implication de cet émirat, autant dans notre pays qu'à l'international, est devenu grandissant voire envahissant pour certains. De l'acquisition du PSG à celle du Printemps, du "fonds pour les banlieues" à l'engagement dans les révoltes arabes, l'activisme débordant du Qatar, de même que son ascension fulgurante, a légitimement suscité une envie d'en savoir plus. Après avoir fait la Une des journaux, le Qatar a donc pris place dans les librairies. Aujourd'hui, pas moins d'une demi-douzaine d'ouvrages sont sortis en l'espace de quelques semaines. Cette inflation livresque est salutaire car l'ignorance est grande à l'égard de ce micro-État qui était inconnu il y a encore une quinzaine d'années. Ceci dit, il faut savoir faire la part des choses. Certains essais sont l'expression d'une réflexion dépassionnée et le fruit d'une solide connaissance de ce pays ; d'autres ont opportunément saisi la balle au bond pour se positionner sur un secteur porteur, ce qui ne va pas sans une légèreté voire une superficialité dans la grille analytique.

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QATAR - Paris, la Tour Eiffel, son club de football, ses stars planétaires... et ses casseurs. Le Qatar a fait l'amère découverte que la ville Lumière n'était pas toujours la carte postale idyllique qu'il imaginait. Avec les nombreux incidents ayant émaillé la remise du trophée du champion de France, les richissimes propriétaires du PSG ont trébuché dans leur marche triomphale.

Ce devait être une fête mémorable pour ce troisième titre national de l'histoire du club, après ceux de 1986 et 1994. Mémorable, ce lundi 13 mai le sera après les débordements de certains "supporteurs" parisiens. L'apparition des champions n'aura duré en tout et pour tout que 5 minutes.

Pas de croisière en bateau-mouche sur la Seine non plus pour les joueurs et leur famille. Pour l'image d'Epinal de Paris by night, on repassera...

"Il va y avoir un impact à court terme", juge Nabil Ennasri, auteur de L’Enigme du Qatar (Armand Colin, 2013), qui cible avant tout la mauvaise publicité faite au club. Mais derrière le PSG il y a l'émirat, dont l'image est inextricablement liée depuis son rachat en 2011. Que va-t-on penser à Doha d'être associé à de tels débordements?

2432448 u-s-secretary-of-state-kerry-attends-news-conference-with-qatar-s-pm-sheikh-jassim-bin-al-thani-in-dohaComment expliquer le volontarisme grandissant du Qatar depuis une dizaine d'années?

Le premier facteur est la vision qui anime les dirigeants de l'émirat. Leurs ambitions ont été décrites dans un document, le "Qatar National Vision 2030". C'est une sorte de feuille de route dont l'objectif est de faire de l'émirat un acteur majeur de la communauté internationale à l'horizon 2030. Pour ce faire, une série de plans quinquennaux sont prévus. Aucun domaine n'est sous-estimé, car le Qatar entend jouer dans la cour des grands, sur les terrains diplomatique, médiatique, économique, sportif et culturel. Le deuxième facteur est la place géostratégique qu'occupe cet Etat. Situé dans un Moyen-Orient mouvementé, l'émirat est dans l'oeil du cyclone, au coeur d'une région du Golfe qui reste la source de toutes les convoitises en raison de la richesse de son sous-sol. Or le Qatar est un Etat petit et vulnérable. Ses dirigeants sont déterminés à compenser cette fragilité par une politique de visibilité. En d'autres termes, le Qatar a besoin de s'afficher pour exister. Grâce au " soft power " -- dans les médias et le sport, en particulier, - l'émirat a pu sortir de l'anonymat. C'est en grande partie cette équation qui explique son dynamisme grandissant. 

NabilEnnasri-3-3Entretien réalisé avec le site d'information alternatif www.foulexpress.com :

Vous venez de publier un ouvrage « L’énigme du Qatar ». Pouvez vous nous expliquer les raisons qui vous ont poussé à publier cet essai?

Son écriture a été motivée par deux raisons principalement. D’abord, j’avais une volonté de mettre à profit mon expérience et mon expertise sur le Qatar, pays dans lequel j’ai commencé à me rendre dès 2004. A l’époque, j’avais bénéficié d’un stage de langue dans le cadre de ma licence d’arabe et de mon cursus à Sciences Po-Aix. En 2006, j’ai validé mon mémoire de Master II consacré aux paradoxes de la politique étrangère de l’émirat. Depuis, je m’y suis rendu à plusieurs reprises dans le cadre de mes travaux universitaires. Ensuite, eu égard à l’incroyable dimension qu’a pris le Qatar dans le débat public français et constatant la pauvreté de la production littéraire sur ce pays, j’ai décidé de me lancer dans l’aventure d’un essai qui puisse donner au public un cadre d’analyse qui satisfasse sa curiosité. Depuis maintenant quelques années, le Qatar suscite de fortes interrogations, inquiète, interroge et interpelle. Le but du livre est donc d’apporter des éléments de réponses à ces légitimes interrogations.

Sans titre 13Eclairage dans cette vidéo de la stratégie de diversification économique de l'Etat du Qatar :

mercredi, 22 mai 2013 02:00

« Que veut le Qatar »

Sans titre 10Vendredi 24 mai, je présenterai "L'énigme du Qatar" à Strasbourg à L'espace Averroès. Plus d'informations dans l'affiche ci-dessous :


 vilian-petit-qatar Ces dernières semaines, les essais sur le Qatar se sont multipliés. Certains relèvent d’études argumentées. D’autres ne dépassent pas le registre des anecdotes croustillantes tissées de révélations tonitruantes. D’autres enfin, mélangeant fantasmes, erreurs et approximations, relèvent des plus simplistes théories du complot.

Le dernier en date est signé par Nicolas Beau et Jacques-Marie Bourget. Son titre, Le vilain petit Qatar, permet de comprendre que les nuances ne seront pas de la partie. Le sous-titre « Cet ami qui nous veut du mal » lève les derniers doutes. La couverture (la tour Eiffel coiffée du drapeau mauve et blanc de l’émirat gazier) donne la tonalité : nous sommes menacés par un Etat conquérant bien déterminé à envahir la France. Le Qatar se donne en effet  « l’ambition d’acheter l’univers ». Il  tente de « s’imposer comme la nouvelle Athènes » et grâce à « l’instrument de conquête » que constitue sa richesse financière, le voilà en mesure de faire « trembler » la France. Rien que ça.

Sans titre 8Je participerai ce soir à partir de 19h20 à l'émission "Le téléphone sonne" sur France Inter en compagnie de Christian Chesnot. Le thème : le Qatar et la visite de François Hollande à Doha.

http://www.franceinter.fr/emission-le-telephone-sonne-le-qatar

tamimhamadLa transition politique que s’apprête à connaître le Qatar, même si elle ne touche pas aux équilibres ni aux fondements du régime, n’est pas dépourvue d’intérêt. Pour la première fois dans l’histoire récente de la région du Golfe, un monarque quitterait le pouvoir de plein gré pour le transmettre à son fils. Si elle venait à se confirmer, cette transition peut s’expliquer par la conjugaison de plusieurs facteurs.

Le premier est l’état de santé de l’émir. Agé de 61 ans, Cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani n’a plus cette fougue qui était la sienne lorsqu’il est arrivé au pouvoir en juin 1995. Affaibli par un diabète et une insuffisance rénale, il a subi en 2010 une cure de jouvence qui lui a fait perdre près de 40 kilos. Avec une santé fragile, il sent peut-être le moment de passer le relais. Ce souhait de céder la place est aussi motivé par le sentiment que, après dix-huit ans de règne, l’idée du travail accompli est largement partagée. De micro-Etat anonyme, le Qatar s’est transformé en un acteur qui joue dans la cour des grands.