Quelle place pour le Qatar dans la géopolitique du gaz ?

lundi, 21 novembre 2016 20:03

QATAR GAZPremier exportateur de GNL (Gaz naturel liquéfié) au monde, le Qatar prévoit une lente augmentation de la demande mondiale en gaz en 2017. Cette projection arrive alors que l’émirat s’active pour arracher un accord au sein de l’OPEP afin d’orienter à la hausse un prix du pétrole historiquement bas.

Ces derniers mois, le Qatar n’a pas ménagé ses efforts afin d’obtenir un accord des pays producteurs pour mettre un terme au contre-choc pétrolier qui dure depuis l’été 2014. Alors que le prix du pétrole s’était établi pendant la séquence 2007-2014 à une moyenne de 100 dollars le baril, ce dernier a brusquement chuté depuis deux ans et demi. Cette dégringolade a mis la pression sur les finances des pays producteurs d’hydrocarbures même si les Etats concernés n’ont pas digéré l’impact de la même manière. Si les pétromonarchies comme le Koweït ou le Qatar semblent plus disposées à encaisser la baisse, il n’en va pas de même pour des pays comme le Venezuela, l’Algérie ou le Nigéria dont les équilibres budgétaires sont gravement mis en péril. Même la puissante Arabie Saoudite et le géant russe ont été contraints de prendre des mesures d’austérité drastiques qui peuvent potentiellement déboucher sur des grondes sociales.  

Effervescence diplomatique

Afin d’enrayer une chute que rien ne semble freiner (le baril a encore perdu cinq dollars en quelques jours la semaine dernière), le Qatar met son puissant réseau diplomatique au service d’une opération destinée à obtenir un accord entre les grands acteurs du marché de l’énergie. Depuis de longs mois, l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) qui regroupe quatorze pays membres et rassemble plus de 40% de la production mondiale peine à trouver un compromis afin de baisser sa production pour réduire la surabondance d’offre sur le marché mondial. L’une des raisons de ce blocage réside dans la confrontation que se livrent les deux puissances du Golfe que sont l’Arabie Saoudite et l’Iran. Si la première ne souhaite pas perdre sa position d’acteur dominant du cartel, la seconde a comme priorité d’augmenter sensiblement ses capacités d’extraction notamment suite à l’accord historique de Genève signé en juillet 2015 qui a levé les sanctions internationales. Pendant près de trois décennies, Téhéran a en effet été limité dans sa production d’or noir du fait de ce blocus qui lui interdisait de rénover ses infrastructures. Désormais, l’heure est à la signature de méga-contrats avec les grandes compagnies pétrolières occidentales afin de moderniser un secteur qui affiche de juteuses perspectives de développement. En plus de la réintégration dans le giron international de son rival historique, Riyad craint également la montée en puissance de l’Irak dont la production, qui avait été au plus bas au cours des années qui ont suivi l’invasion américaine de 2003, a spectaculairement rebondi pour atteindre le chiffre record de 4,8 millions de barils par jour aujourd’hui. Dans un contexte de forte polarisation et de guerre par procuration que se livrent ces trois Etats notamment en Syrie (auquel s’ajoute le soutien russe à l’axe Téhéran-Bagdad-Damas), toutes les conditions sont réunies pour que ces différentes acteurs prolongent sur le terrain énergétique leurs forts antagonismes politiques.

Effort qataro-algérien

Malgré cette équation tendue, deux pays sont aujourd’hui à la manœuvre pour apaiser les tensions et parvenir à un accord qui puisse redresser le cours du brut. Le Qatar et l’Algérie, dont les réunions bilatérales se sont intensifiées ces dernières semaines, ont chacun de leur côté joué leur partition pour trouver un terrain d’entente. En marge du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) tenu la semaine dernière à Doha, les diplomates des deux pays n’ont pas ménagé leurs efforts pour rétablir la confiance entre les différentes ministres présents. L’objectif était double ; il s’agissait d’abord d’intégrer la Russie qui ne fait pas partie de l’OPEP à l’accord sur une réduction de la production. Dans un second temps, l’objectif était de convaincre l’Iran de faire de même alors que ce pays, qui s’estime lésé par des années de sous-production, semble décidé à rattraper son retard le plus tôt possible. Les efforts semblent ne pas avoir été concluants puisque le ministre iranien du Pétrole, Bijan Zenghanah, a fait savoir qu'il ne ferait pas le déplacement dans la capitale qatarie.

Le Qatar membre de l’OPEP et du FPEG

Basé à Doha, le FPEG (qui compte douze Etats membres dont les poids lourds du secteur comme la Russie, le Qatar, l'Iran et l'Algérie) assure plus de 40% de la production mondiale de gaz naturel. Mais à la différence de l'OPEP, il ne décide pas de quotas de production.

Dans ce contexte tendu, la prochaine réunion ministérielle de l’OPEP prévue à Vienne le 30 novembre apparaît comme décisive. Si la décision actée récemment à Alger lors d’une réunion informelle de baisser les quotas des pays membres est maintenue, on peut s’attendre à une réorientation à la hausse des cours du brut. Dans le cas contraire, il est quasi-certain que le baril continuera à se négocier à un niveau bas ce qui pourrait mettre en faillite un certain nombre d’Etats. 

 

 

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