La partie n'était pourtant pas gagnée tant les antagonismes sont forts entre les poids lourds du cartel. Le clivage persistant au sein de l'OPEP demeure celui qui oppose le géant saoudien à l'Iran dont le retour sur la scène internationale s'illustre par la volonté de rattraper le temps perdu en augmentant substantiellement ses capacités de production. Avec l'Irak qui, lui aussi, se réveille et déverse sur le marché des millions de barils de pétrole grâce à l'amélioration de ses infrastructures, Téhéran a partiellement récupéré son retard en terme de parts de marché. Cependant, ce bond en avant, certes apparemment bénéfique pour les premiers concernés, s'est traduit par un déséquilibre entre l'offre et la demande qui a provoqué une dégringolade du prix de l'or noir. Celui-ci qui avait chuté à 30 dollars au plus fort de la crise en 2015 s'est stabilisé autour de 45 dollars ces derniers mois.
L'objectif de la réunion de l'OPEP était donc de trouver un terrain d'entente pour éviter de prolonger cette période de vaches maigres qui met sous pression les finances de nombreux gouvernements. L'Arabie Saoudite semble avoir consentie la plus grande part du sacrifice puisque sur les 1,5 millions de barils que le cartel a décidé de retirer du marché, Riyad a la responsabilité de s'occuper du tiers. Le reste de l'effort est réparti entre les autres Etats membres, hormis la Libye et le Nigeria qui, du fait de leur tragique situation sécuritaire, ont été exonérés de réduire leur production.
Seulement, même si les marchés ont fortement réagi dans le bon sens, rien n'indique que le prix du pétrole continuera sa progression. Si dans les prochaines semaines, les opérateurs remarquent (comme cela a été le cas de manière récurrente par le passé), que certains pays contournent discrètement l'accord, le prix pourra une nouvelle fois fléchir et la perspective d'un cycle d'un tarif du pétrole de plus en bas ne sera pas à écarter. De plus, l'OPEP qui ne représente que le tiers de la production mondiale doit composer avec les autres acteurs de la carte de l'énergie.
Les yeux se tournent aujourd'hui vers la Russie pour savoir si oui ou non Moscou jouera également le jeu d'une inflexion de sa production. Ces derniers jours, le Kremlin semblait donner des gages de bonne volonté car la Russie pâtit elle aussi du manque à gagner d'un pétrole faible. Mais rien n'indique que cette entente tacite entre les gros acteurs du marché tienne dans la durée tellement les méfiances et surtout les antagonismes politiques (en particulier sur la Syrie) plaident pour faire de l'univers du pétrole un nouveau terrain d'affrontement.