Ce qu’il reste, ce sont les dispositions transitionnelles, notamment les modalités d’entrée en vigueur du texte constitutionnel, la date et les conditions de mise en place des futures élections etc. Mais l’essentiel aujourd’hui, est de passer au vote de la Constitution. Il y a une volonté commune d’aboutir au vote définitif avant la date symbolique du 14 janvier. Nous espérons beaucoup pouvoir nous présenter devant les Tunisiens avec un texte constitutionnel effectif le jour du troisième anniversaire de la Révolution.
2/ On parle beaucoup du Qatar ici en Tunisie, quelle en est votre perception ?
Je pense qu’il y a beaucoup de rumeurs infondées et beaucoup de confusion dans la véracité des faits attribués au Qatar. Il y a une forme d’exagération dans l’implication de l’émirat dans notre pays et c’est regrettable. On est dans un imaginaire fantasmé et alimenté par certains intellectuels. Cela vient d’abord du rôle joué par la chaîne Al Jazeera qui a eu un impact non-négligeable dans la Révolution. Cette vision irrationnelle est également entretenue du fait que certains membres du gouvernement ont travaillé pour cette chaîne, ce qui en soit n’est pas un problème. Qu’il y ait des relations entre la Tunisie et le Qatar, oui. Nous avons voté deux conventions de partenariat entre nos deux pays qui concernent notamment la construction de logements ainsi qu’un prêt effectué l’an dernier. Nous n’avons pas plus signé de conventions avec le Qatar qu’avec un autre pays donc cette crainte de voir la Tunisie sous ingérence qatarie est fausse. Je tiens à rappeler par exemple que nous avons signé plus de conventions avec certains pays européens comme l’Allemagne. Je ne vois pas pourquoi il y a une telle focalisation mais je crois penser que certains à travers le Qatar règlent leur compte avec Ennahda. Enfin, rappelons qu’il n’y a pas qu’Ennahda qui a tissé des liens avec cet émirat. Le président de la République lui-même a collaboré avec certaines institutions qataries sans que ce soit interprété comme une forme d’ingérence.
3/ Souhaitez-vous un renforcement des relations entre les deux pays ?
Pourquoi pas. Mais je préfère un renforcement des relations non seulement avec le Qatar mais avec l’ensemble des pays arabes. Dans le domaine du tourisme, de la construction ou de l’énergie, nous avons besoin d’investisseurs, et à partir du moment ou ceux-ci entrent dans le cadre de partenariats fructueux, ils sont les bienvenus. La volonté des Tunisiens est de renforcer les relations avec les pays arabes et africains. Je suis donc pour un élargissement de ces relations. Ce que je regrette, c’est que certaines personnalités ont dépassé les limites du raisonnable et sont dans l’irrationnel car, dès lors qu’on annonce un investissement avec le Qatar on crie au scandale et cela peut freiner des projets de développement. Je tiens à préciser que je suis pour la critique juste et pertinente. Mais parfois, on déborde le cadre de la bienséance et on est plus dans la diabolisation, la diffusion de rumeurs voire de contre-vérités. Cette manière de faire ne fait pas partie de l’éthique des Tunisiens. La critique oui, la diabolisation, non.
Mehrézia Labidi est vice-président de l’Assemblée constituante tunisienne depuis novembre 2011.