Ce n’est pas seulement l’Arabie saoudite qui rappelle son ambassadeur, mais certains pays du conseil de coopération du Golfe (CCG) qui comprend aussi Bahreïn et les Émirats arabes unis.
La tension entre le Qatar et les autres monarchies du Golfe est latente depuis une quinzaine d’années. Dans les années 2000, les relations ont été rompues entre l’Arabie saoudite et le Qatar à cause de la chaîne qatarienne d’informations en continu, al Jazeera, qui n’hésitait pas à critiquer les pays voisins».
Le Qatar va-t-il souffrir de cette mise à l’écart ?
Nabil Ennasri : «Deux tendances s’opposent au Moyen-Orient : celle des régimes conservateurs, qui réprouvent les révolutions arabes parce que, selon eux, elles sont une menace pour la stabilité de la région et de leur régime. Ils sont emmenés par l’Arabie saoudite et les petites monarchies du Golfe. Et ceux qui soutiennent les printemps arabes en Syrie, en Égypte, ou en Libye, emmenés par le Qatar, la Turquie et le Hamas.
C’est une crise sérieuse mais la diplomatie du Qatar a survécu à d’autres plus graves. Cela ne changera pas sa détermination à se faire une place sur la scène internationale. En 15-20 ans, ce pays a mené une diplomatie trépidante, voire arrogante, pour contrer l’Arabie saoudite. Celle-ci, après s’être endormie, se réveille aujourd’hui et veut reprendre le leadership sur les dossiers égyptien et syrien.
Riyad a besoin des autres capitales du Golfe pour contrer l’Iran chiite, perçu comme une menace pour les monarchies sunnites de la région. D’autant plus que les États-Unis ont décidé de renouer leurs liens avec Téhéran en relançant des négociations sur le dossier nucléaire. L’Arabie saoudite considère cela comme une sérieuse menace».
Doha va-t-il rentrer dans le rang ?
Nabil Ennasri : « On n’est pas dans une crise majeure, il y en a eu d’autres. Doha a suffisamment assis sa position, que ce soit dans les domaines sportifs ou diplomatiques pour dépasser cette crise. Il va peut-être devoir rentrer dans le rang, mais ne cessera pas de soutenir les forces de la révolution. Le Qatar parie sur le plus long terme».
(1) Auteur de « l’énigme du Qatar », Iris éditions, 200 p., 19 €