L'ONG met d'ailleurs la pression sur la FIFA pour que cette dernière monte au créneau. De même, certains sponsors de la Coupe du monde sont alertés pour que des mesures plus protectrices soient prises dans les chantiers du Mondial qui emploient quelques 80 000 travailleurs essentiellement originaires du sous-continent indien.
L'un des facteurs qui provoquent le plus de morts et qui est pointé du doigt concerne le temps de travail aux moments des fortes chaleurs. Situé dans une zone désertique et ceinturé par la mer, le Qatar subit en période estivale la pression conjuguée de températures frisant parfois les 50°C avec un taux d'humidité particulièrement élevé. Cette combinaison rend l’atmosphère très lourde et elle explique pourquoi de nombreuses familles qataries quittent le pays à ce moment de l'année pour se rendre dans leurs lieux de villégiature en Europe ou en Asie. Pour l'instant, les autorités ont introduit une loi empêchant les ouvriers de travailler à l'extérieur entre 11h30 et 15h du 15 juin au 31 août.
Mais pour Human Rights Watch (HRW), ces mesures demeurent insuffisantes. De plus, l'ONG demande à l'émirat d'enquêter sur la mort de certains travailleurs immigrés et de rendre les résultats de cette enquête publics. D'après l'organisation, les chiffres que donne le gouvernement qatari sur les morts dans les chantiers sont à la fois biaisés et anciens. En effet, il n'y pas de statistiques officielles dans ce domaine depuis 2012. À l'époque, affirme HRW, sur les 520 travailleurs décédés originaires du Bangladesh, d'Inde et du Népal, il n'y avait ni explication ni enquête pour 385 d'entre eux, soit 74 %.
De son côté, le Qatar se défend en rappelant les nombreux efforts apportés ces dernières années en matière d'amélioration de la condition des ouvriers. Des nouveaux camps dotés d'installations toutes neuves en passant par la loi supprimant le système de la kafala (sponsorship), il est vrai que le pays dispose désormais d'un cadre bien plus attirant pour les travailleurs étrangers que celui de ses voisins du Golfe. Néanmoins, des progrès sont encore à faire pour se hisser aux normes du Bureau international du Travail (BIT). Nul doute que l'émir Tamim, qui recevait il y a quelques jours le patron de la FIFA à Doha et le chef de HRW le mois dernier à New York, prendra les dispositions qui s'imposent pour éviter que le Mondial 2022 ne soit entaché d'un procès permanent.