Le Qatar contraint à rationaliser ses dépenses
Pour pallier les effets du ralentissement de la croissance sur le budget de l’Etat, les autorités se sont engagées dans une politique de rationalisation des dépenses. Elle s’est traduite notamment par une baisse des subventions sur l’eau et l’électricité, une introduction progressive de la TVA sur certains produits ou encore par une restructuration de certains secteurs industriels.
Ces changements ont été appliqués dans le sillage d’un important discours de l’émir du Qatar de novembre 2014 au cours duquel il donnait plusieurs directives en matière de bonne gestion des dépenses et des moyens pour mettre fin aux dépassements des budgets prévus. Ces indications intervenaient après qu’un rapport du Fonds monétaire international (FMI) publié en mai 2014 exhortait Doha à mettre en place un processus de gestion intégré afin de coordonner efficacement les projets d’infrastructures, de prévenir les dépassements de coûts et de respecter les délais de livraison dans le cadre de l’organisation de la Coupe du monde 2022. Le tout, en accord avec la feuille de route du Qatar National Vision 2030.
Un environnement macro-économique sain
Ce dispositif a permis à l’émirat gazier de dépasser les difficultés conjoncturelles auxquelles il était confronté dans un contexte tendu de déficit budgétaire causé par le contre-choc pétrolier qui avait vu le prix du baril dégringoler à des niveaux historiquement bas en 2015. Suite à un accord survenu à la fin 2016 entre les membres de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole), ce dernier a progressivement repris de la valeur. L’année 2017 a ainsi enregistré un excédent courant de 3.8% du PIB tandis que le déficit budgétaire chutait à 5.8% du PIB.
La conjonction de ces éléments a permis au Trésor français de conclure dans son étude que « les fondamentaux macroéconomiques du Qatar demeurent solides ». Trois autres raisons peuvent s’ajouter pour expliquer cette bonne santé économique. D’abord, du fait de la maîtrise du déficit budgétaire rendu possible grâce à l’emprunt et au retrait des réserves bancaires (de l’ordre de 40 milliards de dollars), ce qui a eu pour effet de rassurer le monde des affaires. Ensuite, le niveau de la dette publique (54% du PIB en 2017) et son rating par les agences de notation (AA-/AA3) donnent à l’émirat un crédit relativement fort pour solliciter les marchés internationaux. Enfin, la situation du secteur bancaire dans le pays reste saine, l’émirat abritant certains établissements comme la Qatar National Bank considérée comme la plus puissante de tout le Moyen-Orient.
Le blocus n’a pas fondamentalement affecté l’économie du Qatar
Après une baisse de la croissance au deuxième trimestre 2017 (+0.3% en ga - glissement annuel), celle-ci a rebondi au deuxième semestre 2017 (+2.5% en ga), avec ensuite un léger reflux au premier trimestre 2018 (+1.4%), en raison de la lente reprise d’activités dans les secteurs hors-hydrocarbures. Parmi les bonnes nouvelles de ces dernières années, il y a aussi eu l’ouverture du nouveau port Hamad qui émerge comme l’un des plus fréquentés du Moyen-Orient. Lors de l'irruption de la crise du blocus, son rôle s'est accru jusqu'à devenir central puisqu'il a permis de créer de nouvelles lignes directes permettant d'éviter les pénuries. En outre, l’inflation reste largement sous contrôle.
A moyen-terme, le blocus pourrait conduire le Qatar à accentuer son ouverture internationale et à se diriger vers une diversification de son économie, le tout en soutenant le développement du tissu productif local en autorisant, par exemple, l’investissement étranger à 100%.
Des perspectives économiques favorables
Une autre source d’optimisme pour les autorités est le maintien à la hausse des prix des hydrocarbures qui ont quasiment triplé depuis leur plus bas niveau atteint dans la période 2014-2016. Cette augmentation permettra, selon les prévisions du FMI, une croissance du PIB de 2.6% en 2018 et aura même tendance à croître dans les années futures.
De même, en dépit de sa grande dépendance aux revenus des hydrocarbures, on remarque une amélioration notable en matière de diversification économique. Les secteurs hors-hydrocarbures ont ainsi pesé 51.6% du PIB en 2017 contre 40% en 2011, notamment grâce au développement rapide de grandes entreprises à la renommée internationale telles que Qatar Airways, Ooredoo ou encore Qatar National Bank.
Le rapport conclut en affirmant que la levée du moratoire sur l’exploitation des champs gaziers de l’émirat, annoncée en juillet 2017, devrait générer une augmentation de la production du gaz naturel liquéfié (GNL) de l’ordre de 30% d’ici 2024. Malgré la concurrence de plus en plus vive de nouveaux pays qui aspirent à devenir des acteurs clés de la géopolitique du gaz comme l’Australie, le Qatar reste le premier exportateur au monde de GNL avec une part de marché du total mondial estimée à 27% en 2017.