Le Qatar et le sport : rayonnement, stratégie et développement

dimanche, 31 juillet 2011 02:00

La spectaculaire percée du Qatar dans le domaine du sport a été un des faits marquants de ces dernières années. Pas une discipline sportive n’est aujourd’hui épargnée par l’appétit du petit émirat : football, handball, équitation, tennis, cyclisme etc. Non content d’avoir obtenu l'organisation de la Coupe du monde de football pour 2022 et le mondial de handball pour 2015, le pays postule pour les mondiaux d'athlétisme de 2017 et même les Jeux Olympiques d’été de 2020. Cet engouement est le fruit d’un calcul stratégique mais avec des retombées colossales sur le plan économique

Comme le note Pascal Boniface, le choix stratégique opéré par les dirigeants du Qatar de faire du sport un élément central de leur activité diplomatique correspond à une volonté d’exister dans une région du monde marquée par l’instabilité. « Vivant dans une zone géopolitique troublée (…)

le Qatar a choisi la diplomatie sportive pour exister sur la carte. Le Qatar mise sur la visibilité du sport et son attractivité pour (…) se faire connaître de façon positive dans le monde entier » analyse le directeur de l’IRIS (Institut de Recherche Internationale et Stratégique). Cette obsession de visibilité est donc la meilleure garantie pour les dirigeants du Qatar d’assurer leur sécurité et cet enthousiasme pour le sport devient même une des caractéristiques majeures de l’émirat. Quand on sait qu’en 2006, ce sont 26 milliards de personnes – en audience cumulée – qui ont suivi les retransmissions télévisées des matchs du Mondial allemand, on imagine l’intérêt médiatique d’une telle manifestation. L’Emir du Qatar avait donné le signal de cette orientation stratégique en déclarant qu’il« est plus important d’être reconnu au Comité International Olympique (CIO) qu’à l’Organisation des Nations Unies »…

Petit, très riche et vulnérable, les élites dirigeantes du pays voient donc dans la renommée par le sport l’un des meilleurs atouts pour protéger leurs frontières. L’émirat n’a pas les capacités militaires de l’Iran ou la dimension stratégique de l’Arabie Saoudite – ses deux puissants voisins. Il compense donc sa fragilité par d’autres atouts, non moins négligeables : Al Jazira, le sport ou son activité diplomatique tous azimuts qui en fait aujourd’hui un poids lourd du monde arabe.

L’organisation d’évènements sportifs mondiaux va également permettre au Qatar de s’assurer un moteur pour garantir une forte croissance économique à court et moyen terme. Une récente étude de la banque nationale du Koweït a démontré que le Qatar et ses voisins du Golfe devraient largement tirer profit de l’organisation de la Coupe du monde de football de 2022 grâce aux énormes investissements envisagés en prévision de cet événement. 100 milliards de dollars sont ainsi prévus pour préparer au mieux ce Mondial et on imagine que ce chiffre grossira si le pays emporte l’organisation des autres compétitions pour lesquelles il postule. Les enjeux économiques sont faramineux. A titre de comparaison, la Coupe du monde 2014 de football apportera plus de 70 milliards de dollars à l’économie brésilienne selon une étude du ministère des Sports récemment publiée. Et ce, grâce essentiellement aux investissements pour la construction d’infrastructures, à l’augmentation de la consommation et aux impôts.

Le Qatar est désormais au cœur de la mondialisation du sport et il n’est pas le seul. En 2008, la Chine s’était servie des J.O pour exhiber sa puissance à la face du monde. Et Nicolas Sarkozy qui avait fait le déplacement jusqu’à Genève pour soutenir la candidature de la France à l’Euro 2016 avait fait une déclaration qui sonne comme un écho à celle de l’Emir du Qatar, relevée  plus haut : « Qu’y a-t-il de plus fort que le football ? ».

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