Qatar Solar Energy : Doha se dote de la plus grande centrale d’énergie solaire du Moyen-Orient.

mercredi, 02 juillet 2014 12:55

photoLe Qatar est tributaire de ses réserves gazières gigantesques. Etat rentier, plus de 75% de ses revenus sont issus de la rente des hydrocarbures. Pour rappel, ce micro-Etat possède les troisièmes plus grandes réserves de gaz naturel au monde, derrière la Russie et l’Iran. C’est aussi le premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié. Pour sortir de cette économie mono-exportatrice, le Qatar mise sur le développement des énergies renouvelables, en particulier l’énergie solaire.

Dans le cadre du « Qatar National Vision 2030 »[1], véritable feuille de route que s’est fixé l’ émir du Qatar pour préparer l’avenir du pays, un plan de diversification de l’économie a été lancé. Celui-ci vise à rendre le Qatar moins dépendant des exportations du gaz et du pétrole. Dans cette optique, les investissements à l’étranger dans les banques, les médias, le sport, l’agriculture, le luxe et l’industrie sont perçus comme des leviers d’actions prioritaires. Nombre de ces placements ont été l’œuvre du fonds souverain« Qatar Investisment Authority » (QIA), pierre angulaire de cette politique de diversification. Véhiculant des valeurs positives et offrant une visibilité inédite, ils ont permis de placer le Qatar sur la carte du monde à moindre frais.

Moins médiatisé que les investissements à l’étranger mais tout aussi important, l’émirat vise aussi à doter le pays d’une croissance économique en accord avec la protection de l’environnement et le développement durable. L'article 33 de la Constitution du pays indique que « l'Etat œuvre pour la protection de l'environnement et de son équilibre naturel afin d'assurer un développement global et durable pour les générations futures ». Dans le droit fil de cette préoccupation, le Qatar a décidé de miser sur un secteur hautement stratégique, l’énergie solaire, qui constitue désormais un des piliers de ses investissements futurs.

Il faut dire qu’en plus de la réflexion sur l’indépendance énergétique, Doha se devait de faire des efforts pour coller avec la transition énergétique qui fait partie des axes majeurs de l’agenda économique mondial. En 2004, l’Agence internationale de l’énergie avait classé le Qatar en tête des pays émetteurs de CO2 par habitant. Pour remédier à ce triste record, le gouvernement s’est lancé dans une série de projets d’envergure afin de réduire substantiellement ses émissions de gaz à effets de serre. L’un des premiers projets s’est traduit par la technologie innovante utilisée pour la conception des stades de la Coupe du monde 2022. L’approche adoptée était celle de la construction ou la rénovation de douze stades entièrement climatisés fonctionnant à l’énergie solaire. Les autorités se sont également engagées à satisfaire près d’un quart de la demande énergétique via des sources d’énergies renouvelables d'ici 2030. Sur un autre registre mais toujours avec le même esprit, elles se sont aussi fixées pour objectif d’atteindre 80 % de dessalement de l'eau par l'énergie solaire.

C’est dans ce cadre d’une réduction progressive de son empreinte énergétique que le 9 juin 2014, Qatar Solar Energy (QSE), entreprise spécialisée dans les énergies renouvelables, a fait son entrée sur le marché de l'énergie solaire. QSE est le premier fabricant verticalement intégré de produits photovoltaïques de tout le Moyen-Orient. Avec une capacité de production de 300 Mégawatt par an, le Qatar se dote de la plus importante installation et unité de production d'énergie solaire de la région. En fonction des besoins du marché, les dirigeants espèrent élargir sa capacité de production à 2,5 Gigawatt.

L’inauguration qui s’est faite en grandes pompes avec la présence de représentants du gouvernement, de personnalités étrangères, de leaders de l'industrie et de l'environnement, témoigne de l’importance stratégique d’un tel projet. Parmi les invités, on comptait Robert F. Kennedy Jr., célèbre militant écologiste ainsi que le Dr Rajendra K. Pachauri, président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (IPCC). Avec cette nouvelle plateforme, l’ambition est grande : le Qatar souhaite se positionner comme l’un des leaders de ce secteur en pleine expansion. Salim Abbassi, directeur général de QSE témoigne : « Qatar Solar Energy a pour ambition de démocratiser les énergies renouvelables en proposant des solutions respectueuses de l'environnement, dans un monde où ces défis deviennent urgents.  En réduisant les coûts, notre technologie donnera aux entreprises et aux particuliers les moyens d'obtenir de l'électricité à un prix raisonnable, aussi bien dans les pays développés que sur les marchés émergents ». Précisant l’axe de développement de son groupe, il ajoute « qu’il s'agit d'une étape importante pour le Qatar et prouve que la région peut se placer à la pointe d'une industrie qui assurera de manière durable les générations futures en énergies renouvelables. » L’évènement a été l’occasion d’annoncer la conclusion des premiers contrats. Le premier avec Jermyn Capital vise à fournir 150 MW d'énergie solaire au marché japonais tandis que celui noué avec Power Capital porte sur la fourniture de 150 MW au marché thaïlandais.

Dans sa stratégie de développement, QSE s’emploie à utiliser les techniques d'énergie solaire les plus avancées au monde en regroupant sous une même enseigne la recherche, le développement technologique ainsi que la fabrication de matériaux formant une chaîne de connaissances totalement intégrée, des matières premières aux utilisateurs finaux. Pour mener à bien son processus d’expansion, QSE s’est doté d’un centre de recherches, Al Jazari Center for Excellence, qui rassemble les plus brillants experts de la région ainsi qu’un laboratoire de recherches et développement équipé de techniques de pointe.

Pour signifier sa projection sur une perspective de long terme, QSE vient aussi de signer un accord historique de plusieurs milliards de dollars avec Kazatomprom, entreprise spécialisée dans l’énergie renouvelable au Kazakhstan. L’objectif de cette convention est d’assurer à QSE l'approvisionnement en matières premières (notamment en polysilicon) indispensables pour la fabrication des panneaux solaires. Le contrat s’étale sur les dix prochaines années et permettra à QSE de bénéficier des prix défiants toute concurrence. L’accord couvre également d’autres aspects tels qu’un partenariat sur l’échange de connaissances et de personnels. Une première délégation d'ingénieurs Kazatomprom se rendra en septembre prochain au siège du groupe qatari. Pour certains observateurs, il s’agit là d’un bon exemple de renforcement des échanges high-tech Sud-Sud. Il met également le Qatar à la pointe du marché puisque la demande de polysiliconbrut continuera à croître à mesure que les besoins mondiaux en énergie solaire augmenteront. C’est cette équation qui a poussé Salim Abassi a déclaré « que ce partenariat permettra à QSE d’étendre sa capacité de production à 2,5 GW. L'approvisionnement régulier en matières premières de qualité est essentiel à la mission de QSE afin de fournir à faible coût de l'énergie renouvelable à un prix abordable. Cela accélèrera la démocratisation de l'énergie renouvelable dans le monde ».

L’objectif de la promotion de l’énergie solaire au Qatar est en réalité quadruple. Economique, car elle permettra à moyen terme de produire une énergie à moindre coût et contribuera à s’affranchir progressivement de la dépendance de la manne gazière. Religieux car elle est reflet du souci des autorités de respecter les valeurs islamiques portées sur la protection de l’environnement. Ecologique aussi afin de réduire ses émissions de gaz à effet de serre et d’être en phase avec les conclusions de la Conférence des Nations unies sur le réchauffement climatique qui s’était tenue à Doha en décembre 2012. Diplomatique enfin pour devenir une vitrine mondiale et servir d’exemple pour tout le secteur de la construction durable.

Situé en milieu désertique, le Qatar essaie de tirer profit d’une région qui offre les meilleures conditions au monde pour développer ce type d’énergie. Ensoleillement abondant, faibles précipitations, territoire plat et terres inutilisées. On s’attend donc à un accroissement significatif des investissements dans le secteur de l’énergie solaire dans les années à venir. Signe de cet engouement, Doha organisera les 17 et 18 novembre prochain le Sommet qatari de l’énergie solaire qui réunira plus de 300 experts. Cette prochaine rencontre fait d’ailleurs suite à un rendez-vous déjà organisé en novembre dernier sur le même thème. Comme pour d’autres secteurs d’activité, le pays est en passe de devenir une place incontournable du développement de l’énergie renouvelable dans la région. Salim Abassi ne cache d’ailleurs pas son objectif final : « Quand il aura atteint sa capacité de 2,5 GW, QSE fera du Qatar l’un des plus grands producteurs d'énergie solaire au monde au même titre que le gaz. Et ce, en contraste avec la capacité combinée de production en Europe et aux États-Unis qui s'élève actuellement à 3,4 GW ».



Validé en 2008, il est officiellement mis en œuvre depuis mars 2011. Le plan 2011-2016 prévoit des investissements à hauteur de 125 milliards de dollars.

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