L’accord prévoit également un mécanisme renforçant la coopération turco-qatarie dans le domaine de la formation militaire, l’industrie de la défense ainsi que les manœuvres militaires conjointes. Conformément à cet accord, les deux pays autoriseront l’utilisation de leurs ports, aéroports et espaces aériens.
En outre, les unités militaires turques et qataries organiseront des exercices militaires conjoints et devront mettre en place une force de déploiement rapide en réponse aux défis de sécurité de la région. La raison qui plaide pour un renforcement stratégique bilatéral est la montée des périls en Syrie, en Irak et plus récemment au Yémen. L'ascension de l'Organisation de l'Etat islamique constitue une menace pour tous les pays de la région et une coopération sur le plan militaire devient impérieuse pour la contrer. Faisant figure d'Etats politiquement stables, économiquement prospères et partageant les mêmes options sur les grands sujets régionaux, les deux pays se concertent régulièrement pour apprécier la situation et développer un axe qui puisse devenir l'un des plus solides dans l'équation stratégique du Moyen-Orient. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la Turquie a été l'un des pays les plus visités par l'émir du Qatar depuis son accession au pouvoir en juin 2013.
Accord historique, portée symbolique
La création d'une base militaire au Qatar a, d’une part, une portée historique puisque des soldats ottomans étaient présents dans la région il y a plus de cent ans et c'est contre la domination ottomane que s'est forgé le sentiment national qatari. D’autre part, elle a surtout une portée symbolique : il s’agit là de la première base militaire permanente de la Turquie hors de ses frontières.
Lors de la visite de l’émir en décembre 2014, les deux chefs d’Etats s’étaient prononcés pour la création d’un « Conseil de coopération stratégique de haut niveau » dont l’objectif est d’établir un cadre institutionnel aux relations bilatérales. Ce Conseil stratégique englobera plusieurs domaines de coopération : politique, économique, commercial, culturel, scientifique, technologique, énergétique mais aussi militaire. A ce titre, l’émir du Qatar avait alors déclaré : “L’armée turque, avec son histoire et son expérience, va permettre à notre armée d’améliorer ses capacités”. Une phrase qui annonçait une coopération militaire imminente et qui démontre la force d'un lien stratégique qui semble se consolider avec le temps.
Enfin, il est à rappeler que les deux pays partagent les mêmes points de vue sur deux des dossiers les plus chauds de la région. S'agissant de Gaza, Ankara et Doha font partie des acteurs qui soutiennent le plus la résistance palestinienne. S'exprimant au nom de toutes les factions palestiniennes, Obou Obeida, le porte-parole de la branche militaire du Hamas avait publiquement remercié ces deux pays pour leur soutien lors de l'offensive israélienne de l'été dernier. Sur l'Egypte, les deux pays ont refusé d'adouber le coup d'Etat qui a renversé le président élu Mohamed Morsi. L'axe Doha-Ankara devient donc l'un de ceux les plus en vue dans la carte stratégique régionale.